Résumé de l’auteur/e. Dans le conflit colombien, qui a fait naître différentes formes desolidarités et a suscité l’intervention de nombreux acteurs internationaux, les paysans que nous avons rencontrés ne se contentent pas d’attendre une solidarité venue d’ailleurs. Réunisen collectifs, ces acteurs locaux cherchent à défendre leur territoire et à proposer d’autres formes de développement. C’est la rencontre entre ces organisations paysannes et différentsacteurs de la solidarité internationale qui est au cœur de cette thèse. Pour mieux comprendre comment les paysans construisent ces solidarités, nous proposons de croiser sociologie desmobilisations et sociologie de la solidarité internationale. À partir d’une comparaison et d’unterrain au plus près de deux organisations paysannes, nous postulons que cette solidarité est le résultat de construits sociaux et le produit de rencontres entre acteurs internationaux et locaux à des moments particuliers. Nous analysons ainsi la manière dont les paysans conçoivent et définissent ces relations avec des interlocuteurs internationaux, et comment ils tentent de faire valoir leurs revendications. Les leaders paysans se (ré)-approprient en effet des causes dites « globales », les transforment et adaptent leurs savoirs pour se mobiliser tant aux niveaux local et international que, de manière incontournable, au niveau national.L’internationalisation de leur cause n’apparaît ainsi pas comme une fin en soi pour ces acteurslocaux, mais comme une manière de redéfinir leur place en Colombie.
Principales conclusions (auteur/e). Les relations entre les paysans colombiens et divers acteurs de la solidarité internationale sont le résultat de multiples échanges au cours duquel les uns sensibilisent sur leurs revendications locales tandis que les autres tentent de comprendre ces dernières au prisme des enjeux internationaux de développement. Ces acteurs apprennent ainsi mutuellement de leurs partenaires, et surtout ces relations permettent aux acteurs locaux – les organisations paysannes colombiennes – de continuer à mener leur lutte aux niveaux local et national.
Au niveau national, des revendications comme celles des zones de réserve paysanne, la reconnaissance des victimes du conflit et de leurs demandes de plus de justice sociale, et de leur « droit au retour » dans un environnement sain, ont progressivement émergé dans le débat politique. Au niveau local et organisationnel, les organisations paysannes ont évolué, elles ont intégré divers militants au sein de leurs collectifs, elles ont renouvelé leurs leaders et se sont formées pour affronter la complexité des mécanismes juridiques de restitution des terres etd’aide aux victimes, ainsi que pour construire des alternatives locales viables (développementagronomique, mise en place de projets agro-écologiques, communication alternative, et pédagogie adaptée à la réalité rurale et à la diversité culturelle). Plusieurs mécanismes visant à renforcer la participation de ces citoyens dits « vulnérables » ont également été mis en place par ces organisations paysannes depuis les années 2000, afin de rapprocher les paysans desinstitutions de l’Etat qui ont si longtemps fait défaut dans des zones marginalisées des centreséconomiques du pays.
La mobilisation sociale est donc un des éléments clés du « renforcement des capacités »collectives des acteurs locaux, et elle est également le résultat d’un long processus de relationsmultiples, entre acteurs locaux, nationaux et surtout internationaux. Ces relations internationales continueront de jouer un rôle important dans une période charnière, celle de la mise en place des accords de paix dans les campagnes ; et les leaders paysans et leurs collectifs seront des acteurs incontournables de la transition vers la paix du pays.
Université |
Université de Bordeaux, Sciences Po Bordeaux |
Discipline |
Science politique |
Date soutenance |
09-12-2016 |
Directeur/trice de thèse |
Antoine Roger, Sylvie Ollitrault |
Mots-clés |
Aménagement territorial, restitution des terres, conflits sociaux et fonciers, action collective, mobilisation paysanne, solidarité internationale, Colombie |
Accès en ligne |
https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01447831/document |
Articles/WP liés à la thèse |
Allain Mathilde, Alice Beuf, L’agriculture familiale et ses réappropriations locales par le mouvement paysan colombien, Revue Tiers Monde 2014/4 (n° 220) |
CV de l’auteur/e |
http://www.noria-research.com/project/mathilde-allain/ http://sciencespobordeaux.academia.edu/MathildeAllain https://durkheim.u-bordeaux.fr/Notre-equipe/Chercheurs-et-enseignants- chercheurs-associes/CV/Mathilde-Allain |