Retour sur le colloque  » Pour une nouvelle utopie foncière ? « 

par et | 21 Juin 2024 | 2024: pour une nouvelle utopie foncière

L’EPF74 et l’association Fonciers-en-débat ont mis en commun leurs compétences pour organiser ce colloque sur le thème « pour une nouvelle utopie foncière ? ». C’était l’occasion de partager nos approches et nos savoirs pour interroger la question foncière dans un contexte qui soulève de nouveaux enjeux : enjeux d’aménagement avec l’envolée soutenue des prix fonciers et la pression des usages, enjeux environnementaux avec la prise de conscience d’un besoin de préservation et la montée des risques, enjeux sociétaux avec l’accroissement des inégalités et les tensions pour l’accès notamment au logement. Le contexte de Haute Savoie illustre particulièrement ces enjeux et a montré ces dernières années tout l’intérêt de mettre en place des outils fonciers innovants. Les années actuelles marquent un tournant dans la prise en compte du foncier à tous les niveaux et le besoin de faire un point sur les expériences passées et les pistes à développer. Le collectif d’acteurs d’origines diverses qui participe aux réflexions animées par Fonciers-en-débat, et dont l’EPF74 est membre depuis longtemps, a voulu poser des bases à ce renouvellement nécessaire, démystifier des propositions formulées rapidement ici et là et chercher des modes opératoires concrets : réfléchir une nouvelle utopie foncière ! C’est donc bien la démarche de Pisani qui a inspiré ce colloque.
Le territoire de la Haute-Savoie de par l’existence d’une pression foncière forte endémique (attrait frontalier, tourisme, activité industrielle et économique forte, etc.) a guidé ce colloque.

Le défi a été relevé ! Le nombre de participants venus de toute la France, et de l’autre côté des frontières, a montré l’adhésion des mondes professionnels, des élus, des opérateurs, des chercheurs à la démarche pour un renouvellement des concepts et des pratiques.  Le partage des points de vue était provoqué, perturbant parfois, ferment de connaissance, d’interrogations, et de propositions. Il a conduit à formuler des pistes que l’on peut formuler ci-après :

  • En premier lieu, le concept de « foncier » a changé. Il était objet de droit, actif économique et financier, composant social. Il est aussi matière physique vivante, et peut-être en voie d’épuisement ou de disparition. L’utopie est alors de résoudre le paradoxe d’une survalorisation économique et de la dévalorisation physique dont il fait l’objet. Elle passe par l’hybridation des connaissances et des métiers, en intégrant cette diversité des approches dans les projets de territoire et les projets d’aménagement. Elle passe par l’ouverture des comptes d’opération à des valeurs non encore comptabilisées et la comptabilisation économique de démarches qualitatives ou temporelles.
  • En second lieu, la pratique des questions foncières a été réhabilitée. Objet d’attention dans les années soixante, elle a été délaissée, considérée comme allant de soi. L’utopie est de réhabiliter le professionnalisme des pratiques foncières. Elles ont un rôle moteur dans les stratégies des territoires, les stratégies des parties prenantes alors qu’elles ne sont pas maitrisées. Certaines expériences montrent comment on peut résoudre les situations insolubles en misant sur le savoir et la technicité. Elles doivent être sources d’inspiration.
  • En troisième lieu, la nature économique du foncier doit être reformulée. La prise en compte du foncier comme « bien commun » mérite d’être appréciée. Il ne s’agit pas d’opter pour des solutions radicales et idéologiques, dont les limites ont été éprouvées. Il s’agit de considérer le foncier dans une approche globale, qui intègre les retombées sociales et environnementales, le bien être des personnes, des activités et de la vie humaine. L’utopie est de réconcilier les intérêts privés et les intérêts publics, ou communs et de les intégrer dans les mécanismes de marché. Des formes originales sont retrouvées en remontant l’histoire mais elles sont également pratiquées aujourd’hui sur quelques territoires comme Saint Gingolf, ou dans l’économie sociale et solidaire. Leur décryptage et leur analyse invitent à nous pencher vers des formulations innovantes.

La question des conflits a été abordée en partie. Elle tient pourtant toute sa place dans la définition des politiques et stratégies et dans leur mise en œuvre. Elle requiert une attention particulière et un savoir-faire qui s’intègre dans le passage à l’acte de l’utopie à la réalité.

Le colloque a posé des bases pour les travaux à venir, travaux théorique et travaux pratiques qui permettront de nous retrouver pour poursuivre.

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