Affaire de l’université Paris- Diderot : notion de public au sens de la réglementation ERP et annulation conditionnelle

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Conseil d’État 19 janvier 2018 n°389523.
Conseil d’État 22 février 2018 n°389518.
Le Conseil d’État a statué par deux arrêts successifs sur la décision d’ouverture au public puis sur le permis de construire de nouveaux bâtiments de l’université Paris-Diderot. L’un comme l’autre retiennent que « chacun des niveaux du troisième au huitième étage du bâtiment M6A1 et du quatrième au huitième étage du bâtiment M5B2 comportait des locaux devant être regardés comme ouverts au public au sens de l’article R 123-2 du code de la construction dès lors qu’ils étaient destinés à accueillir des personnes admises dans l’établissement en plus du personnel de l’université ou assimilé, tels que des étudiants ».
Le juge estime que cette erreur de droit « qui n’avait pas été redressée par la commission de sécurité, avait été susceptible de fausser l’appréciation de l’autorité administrative sur la conformité du projet aux règles de sécurité dans le cadre de la délivrance de l’autorisation prévue à l’article L. 111-8 du code de la construction et de l’habitation et entachait par suite d’illégalité le permis de construire qui tenait lieu de cette autorisation en vertu des dispositions du second alinéa de cet article ». Dans l’affaire relative à la légalité du permis de construire, le Conseil d’État fait cependant droit à la demande de modulation des effets de l’illégalité relevée en faisant application des dispositions de l’article L 600-5-1 du code de l’urbanisme. Il peut être fait application de cette faculté pour la première fois en appel, alors même que l’autorisation d’urbanisme en cause a été annulée par les premiers juges. Le Conseil d’État marque implicitement que la recherche de régularisation doit guider le juge en retenant :
« Considérant que, dans le cas où l’administration lui transmet spontanément des éléments visant à la régularisation d’un vice de nature à entraîner l’annulation du permis attaqué, le juge peut se fonder sur ces éléments sans être tenu de surseoir à statuer, dès lors qu’il a préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur la question de savoir si ces éléments permettent une régularisation en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme ; que, toutefois, si les éléments spontanément transmis ne sont pas suffisants pour permettre de regarder le vice comme régularisé, le juge peut, dans les conditions rappelées au point précédent, notamment après avoir invité les parties à présenter leurs observations sur le principe de l’application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, surseoir à statuer en vue d’obtenir l’ensemble des éléments permettant la régularisation ».
Elle censure la Cour qui avait écarté l’effet régularisateur du permis modificatif en proposant une solution – assez complexe – ménageant à la fois la portée de l’article L 600-5-1 mais aussi les principes d’égalité des armes et du principe du contradictoire :
« Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède qu’il n’y a pas lieu d’annuler l’arrêt attaqué en tant qu’il juge que le permis litigieux est entaché des vices rappelés ci-dessus ; qu’il y a lieu en revanche de l’annuler en tant qu’il rejette les conclusions de la SAS Udicité tendant à l’application des dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme et rejette en conséquence les appels dirigés contre le jugement du tribunal administratif annulant le permis, et en tant qu’il statue sur les conclusions présentées devant la cour au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de renvoyer l’affaire à la cour administrative d’appel de Paris, afin qu’elle se prononce à nouveau sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 600-5-1 ; que si la cour, après avoir recueilli les observations des parties, constate que ces vices ont été régularisés par un permis modificatif, ou envisage de surseoir à statuer en fixant un délai en vue de leur régularisation, il lui appartiendra de se prononcer sur le bienfondé des moyens invoqués par les demandeurs de première instance autres que ceux qu’elle a accueillis par son arrêt du 16 février 2015 ».
L’obligation pour le juge non seulement d’examiner si aucun autre vice n’est susceptible d’être retenu mais de se prononcer formellement sur ce point, reprend la solution d’un avis qui traitait déjà de L 600-5-1 (Conseil d’État 18 juin 2014 n°376760 L p. 164) étendue plus récemment à l’article L 600-5 (Conseil d’état 16 octobre 2017 n°398902).