L’enquête sur le prix des terrains à bâtir

Une enquête nationale annuelle permet de suivre le marché des terrains à bâtir pour maisons individuelles… mais pas seulement. Quelles en sont les méthodes ? Quelles informations peut-on en attendre ?

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L’enquête sur le prix des terrains à bâtir (EPTB) porte mal son nom, elle fournit en effet des informations qui vont au-delà du terrain : prix du bâti, caractéristiques de l’acheteur et de la maison individuelle qui est en projet. Cet ensemble d’informations qui s’enrichit au cours du temps doit permettre de mieux appréhender la formation des prix et en particulier le partage entre le foncier et la construction. Exhaustive pour les maisons individuelles sur l’ensemble du territoire français, elle constitue une photographie précise des marchés locaux, favorisant l’émergence de travaux de modélisation spatiale. Dans cette perspective, la géolocalisation des données et donc la possibilité de communiquer avec d’autres sources locales (base des équipements par exemple) est une priorité du SOeS. L’article ci-dessous illustre diverses questions sur lesquelles EPTB apporte un éclairage.

L’évolution des prix du foncier joue sur la taille des terrains achetés

Un premier apport de l’enquête permet de distinguer le budget lié à l’acquisition du terrain et celui associé à la construction. Il est ainsi possible de décomposer l’évolution de l’investissement moyen lorsque le ménage achète le terrain et construit la maison en même temps. Le montant total moyen d’une opération est passé de 189 400 euros en 2006 à 221 000 euros en 2013. Si les coûts du foncier et de la construction ont tous deux augmenté, la progression du foncier a été plus marquée sur la période : le prix moyen d’un m2 de terrain en France s’est accru de 60 % entre 2006 et 2013, passant de 46 euros à 73 euros, quand le prix moyen du m2 de bâti n’a augmenté « que » de 21 %, passant de 1 031 euros en 2006 à 1 244 euros en 2013. La hausse des prix des terrains est en partie liée à l’évolution géographique des achats de terrains, marquée depuis 2010 : la part des terrains achetés en zone rurale est passée de 50 % en 2010 à 43 % en 2013, quand ceux achetés dans les unités urbaines de 200 000 à 1 999 999 habitants, caractérisées par des coûts de transaction plus élevés et des surfaces plus petites, représentent 12 % des transactions en 2013 contre 8 % en 2010.

 

Champ de l’enquête

Initialement centrée sur le prix des terrains à bâtir, le questionnement d’EPTB s’est progressivement élargi et l’enquête fournit aujourd’hui des informations sur les prix et les caractéristiques du terrain (mode d’acquisition du terrain, date d’achat, viabilisation etc.), de la construction de la maison (coordinateur principal, surface etc.), sur sa performance énergétique (chauffage et label énergétique) mais également des éléments sur le pétitionnaire (âge, CSP, s’il est déjà propriétaire ou non). Elle continue à s’enrichir au fil des ans afin de répondre à de nouvelles problématiques, notamment énergétiques. EPTB couvre l’ensemble du territoire français (métropole + DOM). La collecte est assurée depuis 2006 par le Service de l’Observation et des Statistiques (SOeS). En outre, elle est exhaustive depuis 2010 : tous les permis appartenant au champ de l’enquête sont sélectionnés chaque mois à partir de la base Sit@del2 recensant l’ensemble des permis de construire en France. Réalisée par voie postale, le taux de réponse avoisine les 70 %. L’enquête fait l’objet d’une exploitation annuelle (voir par exemple Chiffres et Statistiques n° 576 : « Le prix des terrains à bâtir en 2013 »).

 

Les ménages ont adapté les caractéristiques de leurs projets en réduisant substantiellement les surfaces des terrains achetés (-24,2 %, de 1 332 m² en 2006 à 1 010 m² en 2013), en partie à cause de l’effet géographique susmentionné, d’autre part probablement pour faire face aux hausses de prix et contenir l’enveloppe globale. En effet, le terrain représente environ un tiers de l’investissement en moyenne. En regard, les surfaces des maisons construites sont moins impactées (-4,9 %, de 130 m² en 2006 à 123 m² en 2013), la réduction des surfaces de terrain serait donc ressentie comme un ajustement moins significatif sur la qualité de vie (graphique 1).

 

La localisation du terrain : facteur déterminant du prix

L’échelle de prix varie considérablement selon la localisation du terrain. En effet, pour les particuliers ayant acheté un terrain en 2013 en vue d’une construction, le prix moyen du m2 de terrain s’établit en moyenne à 73 euros mais varie entre 47 euros en zone rurale, contre 310 euros dans l’agglomération parisienne. De fait, le territoire peut se diviser en trois gammes de prix : les zones rurales pour lesquelles le prix est faible et qui représentent une grande partie des transactions (43 %), les agglomérations de moins de 100 000 habitants, avec un prix du terrain autour de 80 euros/m² et enfin les grandes agglomérations où le prix du m2 dépasse les 100 euros (tableau 1). L’impact de la localisation a fait l’objet d’une étude approfondie, réalisée à partir des données 2008 de l’EPTB (Le point sur n° 74 : « Le prix des terrains en France : la localisation, encore la localisation, toujours la localisation » disponible sur le site du SOeS). Celle-ci fait ressortir les principaux facteurs explicatifs du prix (au m²) des terrains dans les aires urbaines en modélisant celui-ci en fonction du type d’aire urbaine (dynamisme démographique, densité de population etc.), de la localisation du terrain au sein de l’aire urbaine et de caractéristiques propres au terrain. Les prix des terrains varient principalement selon l’aire urbaine où ils se trouvent, et ensuite selon la distance entre la commune concernée et le centre de l’aire urbaine. Viennent ensuite les caractéristiques propres des terrains (superficie, viabilisation…). Ces résultats se retrouvent visuellement sur les prix du foncier observés en 2013 (carte 1). Les zones littorales se distinguent également par un prix élevé.

Le prix de la construction est plus difficile à appréhender

Le prix moyen du m2 de bâti est nettement moins sensible à la localisation, il varie entre 1 193 euros dans le rural et 1 470 euros dans l’agglomération de Paris. Les prix des maisons fluctuent non seulement selon les caractéristiques propres au projet (tableau 2), mais aussi selon les modalités d’acquisition du terrain. Les particuliers ayant hérité du terrain, ou l’ayant acheté antérieurement à l’année de lancement du projet, investissent davantage dans la construction de la maison. Pour ces projets, le coût de la construction s’élève en moyenne à 162 400 euros pour une surface moyenne de 127 m², tandis que les ménages réalisant conjointement l’acquisition du terrain et la construction déboursent en moyenne 146 900 euros pour la construction, pour une surface moyenne de 120 m². Trois quarts des terrains dédiés à la construction d’une maison individuelle en 2013 ont été achetés (dont 78 % durant l’année 2013, en même temps que le lancement du projet de construction), les autres ayant été acquis par succession ou par donation. Les acheteurs ont un profil assez jeune : en 2013, 29 % d’entre eux ont moins de 30 ans et 39 % d’entre eux ont entre 30 et 39 ans 1. En 2013, un peu plus de la moitié des constructions de maisons sont supervisées par un constructeur de maisons individuelles, 28 % le sont par les particuliers eux-mêmes et 5 % sont confiés à un architecte. L’impact sur le prix de la construction n’est pas négligeable avec une différence de 460 euros par m² entre l’auto-construction et la réalisation par un architecte.

Une dimension écologique de plus en plus présente

En 2013, 20 % des ménages qui font construire ont opté pour le chauffage tout électrique (en recul de 12 points par rapport à 2012). Les énergies renouvelables (bois, pompe à chaleur, solaire thermique), seules ou combinées entre elles, ont été choisies dans 34 % des projets en 2013 (+12 points par rapport à 2012), devenant de ce fait le mode de chauffage le plus répandu dans la construction de maisons individuelles. En ajoutant les cas où elles sont associées à un autre mode de chauffage, les énergies renouvelables sont présentes dans 47 % des projets (+12 points par rapport à 2012).

 

Des surfaces de maisons comparables dans le temps

Les surfaces des maisons sont exprimées en surface de plancher, surface de référence en urbanisme. Cette surface de plancher a succédé à la surface hors oeuvre nette (SHON) au 1er mars 2012 dans le but d’inciter à l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments (les modalités de calcul de la surface de plancher, contrairement à celles de la SHON, excluent la surface occupée par les murs. Ceci ne pénalise plus les efforts consentis en vue d’obtenir une meilleure isolation et engendre même un gain en termes de droits à construire).

En l’absence de relation simple entre les deux concepts, un coefficient de passage moyen a été déterminé en comparant la distribution des surfaces avant la réforme (exprimées en SHON) avec la distribution des surfaces après la réforme (exprimées en surface de plancher). Ce coefficient de passage de la SHON à la surface de plancher s’élève à 0,93 pour les maisons individuelles. La conversion de la SHON en surface de plancher s’est appliquée aux permis déposés avant le 1er mars 2012, y compris pour les années 2006-2011. Ainsi tous les permis de la période 2006-2013 contiennent des surfaces comparables, exprimées en surface de plancher.

 

Ce mouvement est lié à la mise en place de la nouvelle réglementation thermique RT2012 laquelle s’applique aux projets déposés à partir du 1er janvier 2013, imposant à toute maison neuve une consommation énergétique inférieure ou égale à celle exigée jusqu’à fin 2012 pour l’obtention du label « BBC-Effinergie ». De plus en 2013, 10 % des maisons construites ont un label énergétique certifiant d’une performance énergétique supérieure à celle exigée par la RT 2012.

 

Modalités d’accès aux données

Les résultats issus de l’EPTB sont disponibles en accès libre aux niveaux national et régional sur le site du SOeS. Chaque année, les derniers résultats sont mis en ligne, présentés sous forme d’une publication « Chiffres et Statistiques » accompagnée des tableaux de données mis à jour. Des demandes de résultats sur mesure sont également prises en charge par le SOeS moyennant le paiement du coût de constitution des données. Les diffusions de données issues de l’enquête doivent respecter les contraintes liées au secret statistique : les diffusions ne peuvent concerner que des données agrégées à un niveau géographique établies sur au moins onze unités. Une dérogation peut être accordée afin qu’un demandeur puisse accéder aux données individuelles anonymisées mais non secrétisées, sous réserve de l’approbation du comité du secret, jugeant l’intérêt général du projet d’étude motivant la demande ; c’est dans ce cadre notamment que chercheurs et économistes accèdent aux données de l’enquête.

 

Le mode de chauffage choisi pour le projet dépend de la personne en charge de la coordination des travaux : 22 % des maisons bâties par un constructeur sont chauffées au tout électrique, tandis que 30 % d’entre elles sont chauffées via des énergies renouvelables seules ou combinées entre elles. Ces proportions atteignent respectivement 15 % et 40 % dans le cas du recours à un architecte, et 16 % et 42 % lorsque le particulier supervise lui-même les travaux. Les énergies renouvelables sont particulièrement prisées par les agriculteurs, elles sont présentes seules ou combinées entre elles dans 53 % de leurs projets, et combinées à un autre mode de chauffage dans 13 % des projets. Une étude réalisée à partir des données 2006 et 2007 de l’EPTB (Le point sur n° 24 : « Le mode de chauffage des maisons individuelles : les énergies renouvelables en progression ») revient sur les modes de chauffages choisis à l’époque dans les projets de construction : il en ressort notamment que les énergies renouvelables se sont développées davantage en altitude ou dans les zones où la puissance moyenne d’ensoleillement pendant la période de chauffage est élevée, ceci étant probablement lié à la diversité des énergies qui y sont mobilisables (solaire, géothermie, aérothermie etc.). Il y est précisé également que le choix du chauffage au gaz est déterminé par la disponibilité ou non du réseau de gaz de ville.

Vers une géolocalisation des données

Au final, l’enquête sur le prix des terrains à bâtir est une source unique qui permet d’appréhender distinctement les marchés de la construction de maisons individuelles et ceux du foncier associé. Elle fournit bien sûr des résultats au niveau national, mais aussi au niveau local en raison de son exhaustivité (environ 112 000 enquêtés en 2013 avec un taux de réponse de 68 %). Les études menées à partir d’EPTB utilisent aujourd’hui le niveau communal, joignant aux indicateurs issus de l’enquête les autres caractéristiques des communes (socio-démographique…). Ceci représente un degré d’analyse particulièrement fin. Toutefois, l’analyse des marchés locaux doit passer par une approche multi-sources à des niveaux géographiques très fins notamment pour appréhender les dynamiques infra-communales. Le SOeS a ainsi lancé un projet de géolocalisation de la base des permis de construire. Au terme de ce projet, il sera possible de faire communiquer EPTB avec d’autres sources également géolocalisées et de cumuler ainsi les informations en provenance de plusieurs sources à des niveaux géographiques fins.

 

Chiffres clefs de la construction de logements

La source Sit@del2 permet de suivre le nombre de constructions de logements neufs en France. Les maisons individuelles pures (champ de l’EPTB) représentent ainsi 36 % des logements neufs construits entre 2006 et 2013 (tableau 3). Les différents types de construction ne couvrent toutefois pas uniformément le même champ géographique : les logements collectifs (appartements) se situent principalement au coeur des zones urbaines, tandis que les maisons individuelles pures couvrent plus les zones rurales et périurbaines.

Afin de couvrir les différents types de construction, une enquête sur la commercialisation des logements neufs (ECLN), s’inscrivant en complémentarité de l’EPTB, est réalisée afin de suivre les ventes de logements neufs par les promoteurs (appartements, maisons individuelles groupées et résidences) pour les programmes immobiliers créant plus de 5 logements.

  1. À titre de comparaison, les 20-29 ans et les 30-39 représentent respectivement 16 % et 17 % de la population de plus de 20 ans. Source : recensement de la population 2010, INSEE.