À compter d’avril 2015, l’ajustement de l’offre de lait à la demande ne sera donc plus arbitré par des règles administratives fixées par les pouvoirs publics, mais plus directement par les entreprises de la transformation laitière au travers de l’instauration d’un système de contractualisation avec les producteurs. Ce passage d’une régulation publique de l’offre à une régulation privée aura des incidences sur la structuration à venir du secteur laitier et sur les liens qu’il entretient avec le territoire. En France, où les modalités d’application du régime des quotas ont été plus imprégnées de volontarisme politique que dans d’autres États membres traditionnellement plus libéraux, ce changement de cap suscite aujourd’hui de nombreuses réflexions 1. Ces dernières sont d’autant plus intenses que, parallèlement, de nouveaux éléments s’invitent dans les débats, tels que l’accentuation de la volatilité des prix en agriculture, le recul de l’élevage au bénéfice du développement des céréales dans les zones à faible densité laitière, le renforcement des normes environnementales, l’arrivée de nouvelles technologies de traite (robotisation) ou, encore, l’augmentation sensible du prix du foncier. Dans ce cadre, cet article propose, à partir du cas français, une analyse portant, d’une part, sur les modalités d’application et les principales implications de la politique de contingentement et, d’autre part, sur quelques évolutions anticipées après la fin des quotas. Une attention toute particulière est portée à certaines questions liées aux préoccupations foncières telles que la répartition territoriale de l’offre et capitalisation des droits dans les valeurs foncières.
L’instauration des quotas et la nécessaire régulation de l’offre
La mise en oeuvre en avril 1984 des quotas laitiers dans la Communauté Économique Européenne (CEE) a marqué un tournant majeur de la PAC. Un quart de siècle après l’adoption de la PAC, dont l’un des objectifs était de développer la production agricole, il convenait déjà de se doter d’un instrument efficace pour parvenir à contrôler l’offre de lait dont le rythme de croissance était devenu plus rapide que celui de la demande. Un développement soutenu de la production laitière avait en effet été permis grâce au progrès génétique des bovins, à l’intensification des pratiques agricoles (avec le recours fréquent à la culture de maïs fourrage et aux importations de tourteaux de soja), à l’amélioration des infrastructures dédiées à cette production, mais aussi au cadre protecteur offert par les différents mécanismes de soutien inhérents à la PAC. Ces derniers recouvraient les prix garantis au producteur fixés à un niveau élevé ; l’octroi d’aides directes spécifiques pour les agriculteurs localisés dans les zones défavorisées ; l’intervention publique sur le marché en cas de baisse sévère des prix (stockage des éventuels excédents de production) ; l’octroi de restitutions (aides) aux exportations de produits laitiers pour permettre aux entreprises exportatrices de combler le différentiel de compétitivité avec les firmes étrangères ; l’application de droits de douane aux frontières pour protéger le marché domestique d’importations à bas prix en provenance du marché mondial. Partant de ces instruments de régulation, l’Organisation Commune des Marchés (OCM) du lait et des produits laitiers, entrée en vigueur en juillet 1968, est ainsi devenue, en quelque sorte, victime de son succès. La production laitière a augmenté dans tous les pays impliqués, les échanges intra-communautaires se sont accrus et les importations en provenance du reste du monde ont baissé. Dans un contexte caractérisé pourtant par une hausse de la demande de produits laitiers sur le marché domestique, la CEE est ainsi passée rapidement d’une situation déficitaire à un excès structurel de production. Dès le milieu des années 70, plusieurs mesures ponctuelles destinées à réduire les déséquilibres avaient été instaurées par les autorités communautaires : aides à la consommation de produits laitiers ; aides à l’abandon de la production laitière dans les exploitations volontaires ; instauration d’une taxe de coresponsabilité. L’ensemble de ces mesures n’est cependant pas parvenu à enrayer suffisamment la dynamique productive à l’oeuvre, laquelle a alors induit une hausse problématique des dépenses publiques allouées à ce secteur. Ainsi, en dépit d’un débat controversé entre États membres sur les outils à privilégier pour maîtriser l’offre 2 et de l’opposition parfois vigoureuse des organisations agricoles, un système de contingentement de la production a été arrêté 3. Celui-ci repose sur la fixation d’une quantité globale de référence répartie par État membre ; la fixation d’une quantité de référence par producteur (formule A) ou par acheteur/laiterie (formule B) ; l’application d’une pénalité financière au producteur en cas de dépassement de son quota.
Des choix français favorables à une répartition territoriale équilibrée de l’offre laitière
Le règlement communautaire a laissé certaines latitudes aux États membres pour appliquer le régime des quotas laitiers 4. Dans ce cadre, les gouvernements français successifs ont toujours veillé à utiliser ces dernières, d’une part, pour favoriser les exploitations agricoles familiales de dimension moyenne et, d’autre part, pour limiter le processus engagé (entre 1970 et 1984) de concentration de la production laitière dans les régions bénéficiant d’avantages comparatifs. Les principaux choix français, précisés par le décret du 16 juillet 1984, doivent être rappelés ici car ils ont eu une influence déterminante sur la dynamique du secteur, mais aussi sur les liens que celui-ci tisse depuis lors avec le foncier agricole.
• La formule privilégiée en France pour appliquer les quotas laitiers a été celle définissant un quota de production par laiterie (formule dite « B »). Les références de base des laiteries ont été initialement calculées comme la somme des livraisons observées en 1983, diminuée d’un pourcentage propre à respecter le quota national de la première campagne (fixé à 25,5 millions de tonnes). Deux quantités globales garanties ont été définies, l’une pour le lait livré en laiterie et l’autre pour le lait commercialisé en vente directe. Depuis 1987, et pour éviter tout risque de dérive de la production laitière, tous les producteurs qui dépassent leurs quantités de référence individuelles sont pénalisés, quelle que soit la situation de leur acheteur et quelle que soit aussi la situation nationale en fin de campagne.
• Les exploitations laitières localisées dans les zones de montagne ont bénéficié d’un traitement de faveur en n’étant pas soumises à la même réduction du niveau de quota que les exploitations de plaine.
• La gestion administrative des quotas a été décentralisée à l’échelle de chaque département, du moins jusqu’en 2011, date de création des neuf bassins de production (décision prise pour permettre une transition vers la fin des quotas laitiers, dans un contexte de recul de l’offre dans certain département). Ce choix de décentralisation a été crucial quant à l’ancrage territorial de la production laitière. Il diffère de celui privilégié dans d’autres États membres, comme par exemple aux Pays-Bas, au Royaume-Uni ou en Allemagne, où un système de marchandisation des droits à produire a été privilégié. Ce dernier a permis un déplacement géographique partiel de la production laitière au bénéfice des zones et des exploitations les plus compétitives.
• Moyennant l’adoption d’une gestion administrative rigoureuse et souvent critiquée par les agriculteurs en place, une réserve de droits à produire a été constituée. Cette réserve, qui permettait d’allouer gratuitement des droits à produire aux agriculteurs jugés prioritaires (dont les jeunes et ceux engagés dans un plan de modernisation), a été alimentée par deux canaux. Le premier tient aux références libérées via les programmes d’aides à la cessation d’activité laitière, qui prévoyaient le versement d’indemnités aux producteurs qui s’engageaient à cesser partiellement ou définitivement toute production de leur lait. Ces programmes avaient pour ambition de permettre à de nombreux producteurs âgés de mettre fin, dans des conditions honorables à leur activité professionnelle. Ils visaient aussi à restructurer les zones de collecte autour d’exploitations de plus grande taille de façon à limiter le coût de collecte du lait par les laiteries. Le second concerne l’application de prélèvements sur les droits à produire au moment des transferts de fonciers entre agriculteurs. En France, et selon une mécanique jugée souvent complexe par les acteurs impliqués, les transferts de références laitières ont été strictement liés aux transferts fonciers. Ainsi, un prélèvement de droits à produire était appliqué dès lors que les deux conditions ci-après n’étaient pas réunies : le transfert porte sur la totalité de l’exploitation (terres, bâtiments, cheptel, matériel) ; le bénéficiaire n’était pas auparavant un producteur laitier 5.
Trente années après l’adoption des quotas laitiers et grâce aux différentes options retenues en France, force est de constater que le mouvement de concentration territoriale de la production laitière a été nettement freiné depuis la mise en oeuvre des quotas. Ainsi, par exemple, les trois régions de l’Ouest (Basse-Normandie, Bretagne et Pays-de-la-Loire), qui avaient bénéficié d’une accélération plus rapide de leur production que la moyenne nationale entre 1970 et 1984, ne sont pas parvenues, tout au long des trois dernières décennies, à augmenter leur contribution relative à l’offre nationale de lait ; elle varie entre 46 % et 49 % selon les années. Entre 1983 et 2013, la collecte de lait a baissé en moyenne de 5 % dans ces trois régions de l’Ouest contre 8 % en moyenne nationale. Pour les raisons évoquées précédemment, les régions ayant une fraction importante de leur territoire en zones défavorisées ont enregistré, quant à elle, une légère progression de leur collecte ; c’est le cas de l’Auvergne (+4 %) et de la Franche-Comté (+3 %) où les exploitations souffrent de conditions de production plus difficiles et d’une production annuelle de lait inférieure à la moyenne nationale. En dépit de la volonté politique de maintenir le lait dans les territoires, un recul assez significatif de la collecte est observé dans certaines zones spécialisées en céréales ou de polyculture-élevage à faible densité laitière. Le recul de la collecte a été de 32 % en Poitou-Charentes et en Aquitaine, 24 % en Midi-Pyrénées, 22 % en Bourgogne et 20 % dans la région Centre 6.
Au cours de la période plus récente (2014 à début 2015), la production laitière française est repartie légèrement à la hausse en raison de prix à la production stimulants, de la qualité des récoltes fourragères et, aussi, des décisions prises lors du bilan de santé de la PAC de 2008 consistant à augmenter le quota laitier de 1 % par an pour la période 2009 à 2015. Cette décision visait à rendre les quotas progressivement moins contraignants. En France, au cours des dix dernières années, la collecte de lait a été régulièrement inférieure au niveau du quota, avec un creux atteignant -8 % en 2009, année exceptionnellement mauvaise au niveau des prix payés à la production.
Les quotas ne sont pas exempts de critiques : la capitalisation des droits à produire dans les valeurs foncières
Le régime des quotas laitiers a toujours fait l’objet de débats controversés au sein de la communauté scientifique 7 et des différentes organisations impliquées. Nombreux sont les auteurs qui soulignent la pertinence de cet instrument pour réguler l’offre, maîtriser les dépenses publiques, répartir la production de manière équilibrée sur le territoire 8 et accompagner en douceur la restructuration du secteur productif (avec moins de radicalité en tout état de cause que le choix alternatif consistant à procéder aux ajustements de l’offre à la demande par le seul canal des prix). Pour autant, d’autres voix s’élèvent pour dénoncer certaines insuffisances inhérentes à cette logique de régulation.
La critique la plus classique consiste à souligner que les quotas laitiers ne favorisent pas une allocation optimale des ressources en constituant une entrave au processus de concentration de la production dans les exploitations et les régions ayant des avantages comparatifs. Il en résulte une pénalisation des consommateurs car le coût moyen de production du lait n’est pas optimisé. Cette approche, qui répond à une logique d’abord économique, suppose d’accepter l’idée que la faiblesse du prix de vente des produits laitiers aux consommateurs doit être un objectif à poursuivre.
Une seconde critique met en avant le fait que les quotas seraient devenus une instrumentation du passé, ce pour deux raisons essentielles : la première tient au fait que les outils mobilisés parallèlement au régime des quotas dans le cadre de la PAC ont, eux-mêmes, profondément évolué avec la baisse du montant des restitutions aux exportations, la réduction des droits de douane ou l’instauration du découplage des aides directes ; la seconde considère que l’accroissement de la demande mondiale de produits laitiers, notamment en provenance des pays asiatiques, justifie aujourd’hui de se doter d’un système de gestion de l’offre plus souple et plus réactif, permettant de se saisir des opportunités offertes à l’international.
Une troisième critique à l’égard des quotas laitiers est qu’ils sont susceptibles de générer des rentes dans la mesure où l’entrée dans le secteur est conditionnée à l’obtention d’un droit à produire. Dans certains États membres, mais pas en France, le droit à produire peut être économiquement valorisable par la voie du marché, au travers d’un système de bourses aux quotas. Ainsi, par exemple, certains agriculteurs néerlandais ont acheté des quotas pour un prix avoisinant parfois deux euros par litre. Dans un tel cas, le régime des quotas laitiers conforte la situation de rente du propriétaire des droits, freine l’installation des jeunes agriculteurs et concoure, par l’augmentation induite des coûts de production en amont, à une hausse des prix de vente des produits laitiers aux consommateurs. La valeur unitaire des droits à produire a cependant fortement baissé au cours des dernières années en raison de l’anticipation faite sur la fin des quotas par les potentiels acheteurs. À compter de 2015, une fois que les quotas auront été remplacés par l’adoption de contrats entre producteurs et industriels, la question de la valorisation commerciale des contrats subsistera.
En France, où les droits à produire ne sont pas marchands, la rente liée aux droits à produire s’exprime aussi, mais de façon sûrement moins intense et plus discrète au travers des valeurs foncières. Un producteur de lait propriétaire de ses terres qui cède l’intégralité de son exploitation à un repreneur cherchera, d’une manière ou d’une autre (souvent au travers de l’estimation du prix du foncier), à tirer profit financièrement de ce droit à produire 9. Bien qu’il soit difficile techniquement de le prouver précisément à une échelle géographique large, un certain consensus existe autour de l’idée que le prix des terres a été influencé par ce processus 10. De nombreux autres facteurs imbriqués influent concomitamment : la baisse régulière des surfaces agricoles au profit d’autres activités (artificialisation) ; le renforcement des contraintes environnementales, comme par exemple la directive « nitrates », qui imposent aux agriculteurs de disposer de plus vastes surfaces pour l’épandage des déjections animales ; l’augmentation tendancielle du prix des céréales qui modifie les jeux concurrentiels entre productions, etc. Dans de nombreuses petites régions agricoles spécialisées en production laitière, le prix des terres demeure aujourd’hui, en dépit de cet effet de rente, nettement inférieur à celui constaté dans les zones concurrentes des pays du nord. Ainsi, par exemple, le prix moyen du foncier agricole est dix fois plus élevé aux Pays-Bas que dans la région des Pays-de-Loire. Cela confère d’ailleurs aux exploitations françaises un atout concurrentiel indéniable, même si la productivité du travail est souvent moins élevée. Par ailleurs, et de façon strictement juridique, le quota est lié à l’exploitation et non au foncier, puisqu’il n’appartient pas au bailleur en cas de cessation d’activité de son locataire 11. Dans le cas des exploitations en fermage, c’est en effet l’agriculteur locataire qui est le seul titulaire des quotas laitiers. Ainsi, dans l’hypothèse où celui-ci opterait pour un abandon de la production laitière, le propriétaire du foncier ne pourrait s’y opposer quand bien même cette décision serait de nature à lui faire perdre une partie de la valeur de son patrimoine.
Un bilan sur les quotas et des perspectives pour l’après 2015
Après trente années de politique de contingentement, force est de considérer que les quotas laitiers n’ont pas empêché une restructuration en profondeur du secteur laitier, tant en France que dans les autres États membres. L’amélioration de la productivité au niveau du facteur travail (permise par les technologies), l’intensification des pratiques agricoles, les progrès zootechniques, les innovations organisationnelles et l’ouverture croissante des marchés sont autant de facteurs qui agissent de manière complémentaire. Ainsi, avec ou sans le maintien des quotas, il est fort probable que certaines tendances déjà à l’oeuvre se poursuivront dans les années à venir. Autrement dit, si la PAC est importante, elle ne fait pas tout.
Le nombre d’exploitations livrant du lait à l’industrie est passé, en France, de 384 950 en 1983 à seulement 67 380 en 2013 (Tableau 1), soit une division par plus de cinq des effectifs. Le recul a été drastique (division par environ dix des effectifs) dans quatre régions (Alsace, Aquitaine, Bourgogne et Centre) où la production céréalière occupe une place importante. Il a été spectaculaire en Poitou-Charentes (division par 15) où la taille des exploitations pérennes a considérablement progressé. Dans ces régions, les exploitations résiduelles ont été, d’une certaine manière, favorisées par la gestion à la française des quotas laitiers. Les volumes de lait à redistribuer en moyenne par exploitation était, en effet, d’autant plus conséquents que les exploitations qui abandonnaient la production laitière étaient nombreuses au prorata de celles candidates à une croissance. La situation était moins avantageuse dans des régions laitières spécialisées, où les espoirs de croissance exprimés par les éleveurs ne pouvaient être que rarement satisfaits. En comparaison, le recul du nombre de producteurs a été nettement moins intense dans une région telle que la Franche-Comté (division par trois), en raison d’une dynamique plus favorable de la collecte laitière globale et, surtout, du modèle de développement privilégié autour des filières fromagères à haute valeur ajoutée 12.
La baisse du nombre d’exploitations laitières devrait se poursuivre dans les années à venir sous l’influence de trois facteurs principaux : l’augmentation de la productivité du travail est facilitée par l’arrivée des nouvelles technologies de traite (robotisation) ; la spécialisation de certaines exploitations autour de l’activité laitière pourrait se renforcer, quitte à externaliser certaines tâches telles que celles liées au travail du sol ; certaines exploitations individuelles fusionnent pour donner lieu à des structures multi-associés de plus grande taille (20 % des vaches laitières en France sont concentrées dans des étables de plus de 100 vaches). Le rythme de la restructuration à venir n’est cependant pas écrit à l’avance. Il dépendra aussi des nouvelles formes de relations contractuelles entre les producteurs et les industriels (modalités de transfert des contrats entre agriculteurs), de l’évolution du prix de l’énergie, des modalités d’attribution des aides directes de la PAC et des futurs rapports de prix entre productions agricoles. Avec la suppression des quotas, il demeure fort probable que la production laitière se concentrera davantage dans les zones et les exploitations les plus compétitives. Les politiques environnementales auront, sur ce point, une influence majeure car elles jouent parfois le rôle de contrepoids face aux phénomènes d’agglomération 13.
Sur un autre plan, la baisse du cheptel national de vaches laitières (division par près de deux des effectifs depuis l’application des quotas) fait également partie des évolutions susceptibles de se confirmer à l’avenir. L’essor des techniques modernes appliquées au domaine de la génétique animale, le développement de la robotisation (qui permet d’augmenter la fréquence de traites) et l’optimisation des systèmes alimentaires 14 favorisent, en effet, l’augmentation du rendement laitier par vache et par an. Dans un cadre où la consommation française de produits laitiers baisse légèrement, seul un très fort développement des exportations sur les marchés internationaux, justifiant un accroissement substantiel de la production, serait en mesure de contrecarrer cette évolution pressentie.
La restructuration du secteur laitier concerne aussi les entreprises de la transformation (650 unités pour 55 300 salariés en 2013), dont le nombre a lui aussi fortement baissé au gré des processus de fusions et d’acquisitions, eux-mêmes soumis à des règles strictes issues du droit de la concurrence. Parmi celles-ci, plusieurs grands groupes, privés (Lactalis, Bongrain, Danone, Bel, etc.) et coopératifs (Sodiaal, Laita, Agrial-Eurial, etc.), jouent un rôle prépondérant dans la collecte nationale de lait et dans le développement des exportations. La balance commerciale française en produits laitiers s’améliore pour atteindre 3,5 milliards d’euros en 2013 (contre 2 milliards d’euros en 2000), en raison essentiellement des exportations accentuées vers les pays tiers (dont les trois premiers clients sont les États-Unis, l’Algérie et la Chine). Si la Nouvelle-Zélande et les États-Unis profitent actuellement plus de l’essor de la demande mondiale, la France dispose de sérieux atouts pour prospérer à long terme : un prix du foncier relativement bas par rapport aux zones concurrentes ; un contexte pédoclimatique favorable à l’obtention de bons rendements fourragers ; une bonne densité de production qui limite les coûts de collecte ; la présence d’industriels de premier plan au niveau international ; une crédibilité dans le domaine de la traçabilité et de la maîtrise de la qualité ; une diversité de modèles productifs propice à offrir une palette diversifiée de produits finis.
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