Economie Rurale (2019), 369, juillet-septembre 2019, pp. 83-101
Abstract (authors) : Depuis 2003, le réseau Terre de Liens (TDL) propose de considérer le foncier agricole comme un bien commun, objet de soins et de luttes. Par un processus singulier d’acquisition et de gestion collective de fermes, TDL vise la sortie à long terme de la terre hors du cadre de la propriété individuelle et du marché foncier spéculatif. L’article interroge le renouvellement des pratiques de gestion foncière porté par TDL, par ailleurs en quête de légitimation vis-à-vis des acteurs institutionnels. À partir de quelles valeurs et avec quels outils le réseau conduit-il ses actions relatives au foncier ? Comment transforme-t-il la prise en compte des questions foncières à l’échelle de territoires ? Les résultats montrent que la charte de TDL et le discours de deux de ses leaders nationaux s’appuient sur des valeurs dites citoyennes, qui entrent en rupture avec des valeurs paysannes, en termes de propriété du foncier et de prise de décision quant à sa gestion. TDL déconstruit le rapport dualiste propriétaire-fermier en y intégrant des acteurs tiers (citoyens bénévoles). En s’appuyant sur ses fermes pour porter un projet politique, le réseau construit une « territorialité du commun », centrée autour de pratiques de « gestion patrimoniale » du foncier et du bâti agricole.