Résumé de l’auteur/e.
L’ « urbanisme paysager » fait référence à une « vieille » pratique de projet spatial qui accompagne, depuis leurs débuts, l’exercice de la planification urbaine et l’art des plans de ville en France. Elle retrouve aujourd’hui une raison d’être dans un contexte de passage d’une planification urbaine à une planification dite « territoriale », entre ville et campagne, où l’urbanisme ne peut plus seulement se concevoir comme une série d’actes techniques, mais doit s’accompagner d’une pédagogie pour transmettre et partager la prise en charge de ses objectifs environnementaux avec les acteurs socio-économiques locaux. En Italie, les chercheurs de l’école territorialiste proposent une approche de projet territorial
susceptible de renouveler les savoir-faire de l’urbanisme paysager face aux nouveaux défis
posés dans le contexte français. Sur la base d’une analyse réflexive d’expériences pratiques
construites entre recherche, action et enseignement, cette thèse a pour objectif d’éclairer
l’apport territorialiste à l’urbanisme paysager.
Principales conclusions (auteur/e).
– La première partie de la thèse, vise à définir la pratique de l’ « urbanisme paysager » dans sa dimension historique afin d’éclairer la construction progressive de ses savoir-faire dans un rapport réflexif à l’action pratique qui engage l’interprétation de modèles étrangers, dès lors que ceux à l’oeuvre dans le contexte français s’avèrent inopérants pour répondre à des objectifs d’action publique renouvelés. Cette lecture diachronique répond à une double finalité de constitution d’un socle théorique, dans une visée de légitimation professionnelle de la pratique de l’urbanisme paysager et d’énonciation d’un constat critique face aux limites de cette pratique dans le contexte d’action de la planification territoriale et de ses processus de projet négociés.
– Dans un deuxième temps, la thèse explore la méthodologie territorialiste qualifiée de
« pédagogie de projet » de par sa construction explicite et rigoureuse, orientée vers
l’enseignement de la planification territoriale, et au regard de sa conception collaborative
associant acteurs publics, habitants et scientifiques. En analysant les ouvrages produits par les enseignants-chercheurs de l’école territorialiste depuis les années 1970, la thèse livre un apport documentaire pionnier sur une approche de projet de territoire, seulement connue en France par les deux ouvrages d’Alberto Magnaghi, Le projet local et La Biorégion Urbaine, la thèse n’ayant pas pour objet d’en livrer une lecture critique mais d’en saisir les apports possibles pour l’urbanisme paysager. En matière de figuration spatiale, l’école territorialiste propose ainsi une lecture interprétative de l’espace qui envisage les écosystèmes sous une dimension construite par les activités humaines à travers le temps long de l’histoire mais aussi selon une vision contemporaine, comme les produits d’une économie locale en cherchant à renforcer les synergies entre consommateurs, producteurs et activités de transformation. Par ailleurs, la représentation de l’espace est placée au cœur des démarches de projet collaboratives dont les enseignants-chercheurs territorialistes favorisent le développement en accompagnant la reconnaissance du « patrimoine territorial » par les acteurs locaux, dans un rapport d’échange et de co-apprentissage entre universitaires investis dans la planification et habitants.
– L’exploration de ces démarches et la construction évolutive de représentations spatiales qui d’un statut de productions scientifiques et étudiantes, gagnent progressivement une valeur pour l’action publique, est envisagée dans un dernier temps. Il consiste à analyser et à caractériser la mise en œuvre de la méthodologie territorialiste en Italie puis en France
(Gironde) dans un cadre de recherche expérimental impliquant l’université et des partenaires institutionnels porteurs de projets de territoire (Parcs Naturels Régionaux et syndicat mixte porteur de Schéma de Cohérence Territoriale notamment). C’est ici la dimension du projet comme processus qui est interrogée ainsi que la participation de l’université à l’évolution des démarches praticiennes de l’urbanisme en mobilisant la formation pour initier un changement des pratiques au sein des institutions publiques par le biais de stages au cours desquels étudiants développent la méthode territorialiste. Autour de Bordeaux, cette expérimentation (encore en cours) a des effets concrets dans la mise en œuvre d’une démarche de charte paysagère dont l’objet principal s’est déplacé, de la mise en valeur du paysage, simplement envisagé comme cadre de vie, vers une conception de l’espace agro-forestier comme espace productif au service du développement local et d’une économie de proximité.
– Au terme de ce développement, la thèse nuance néanmoins l’apport territorialiste à
l’urbanisme paysager français en matière méthodologique et technique, cette approche
contribuant surtout à relier dans un tout organisé et à les constituer en méthodes des
démarches conceptuelles existantes, pour certaines, depuis les années 1970. Elle retient
autrement et indépendamment de leur idéologie politique située, la posture engagée des
enseignants-chercheurs toscans dans une attitude de praticiens-réflexifs qui procède par allerretour permanent entre la recherche théorique et l’action pratique conçue comme une
expérience de recherche qui implique la formation. Inédite en France, cette attitude qui
soutient une réflexion scientifique critique et méthodologique sur l’élaboration des
représentations spatiales associées aux projets d’urbanisme et de territoire, ne peut-elle pas nous inspirer dans un contexte où en dépit des défis posés par l’action publique, les
productions scientifiques dans ce domaine sont datées ?
Université | Bordeaux 3 |
Discipline | Aménagement de l’espace et urbanisme |
Date soutenance | 05-12-2016 |
Directeur/trice de thèse | Agnès Berland-Berthon, Daniela Poli |
Mots-clés | Urbanisme paysager, planification territoriale, projet de territoire, Italie, école territorialiste |
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Articles/WP liés à la thèse
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– « La planification paysagère, de la prescription à la co-production du territoire. Deux situations d’atelier en comparaison entre l’Italie et la France » in : Urbia, 2017, en cours d’édition. 12p.
– « Quand les habitants dessinent leur ville. L’expérience des « cartes de communauté » en Toscane et en Italie du Sud » in : Figures de l’Art, 2016, pp.245-256. – « Interpréter le paysage comme projet. L’apport biorégionaliste toscan à la planification territoriale » in : Géo-regards, n°8, 2015, pp.39-53 |